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Tanènè : le pont qui va révolutionner le trafic émerge du Konkouré 

Bientôt la fin du calvaire au niveau des quatre ponts métalliques sur le fleuve Konkouré à Tanènè sur la RN3. Ces quatre ponts métalliques construits en 1957 par la société française Pechiney, dans le cadre de l’implantation de l’usine d’alumine de Fria pour des convois, dit-on, de 30 tonnes, alors qu’actuellement ces convois sont dans l’ordre de 80 tonnes.

Il est sur l’un des axes économiques les plus importants de la Guinée parce qu’il assure la liaison entre les préfectures de Dubréka, Boffa et Boké, qui sont les principales zones minières du pays. Mieux encore, il fait partie de la transafricaine N°7 (THA7) Dakar-Lagos. Lancés le 18 janvier 2023, les travaux de la construction du pont unique et ses accès sur le Konkouré à Tanènè sont très avancés. C’est le constat fait le jeudi 26 octobre 2023, soit 10 mois après, par le reporter de votre magazine. Les travaux sont exécutés par le groupement d’entreprises Leduc Guinée/SOGEA SATOM sur une période de 18 mois.

La base vie et technique

Ce pont mixte de type double poutre longitudinale en acier et tablier béton est construit par LEDUC Guinée. Il comportera deux voies avec installation d’un poste de péage, poste de pesée, d’une station-service et d’une aire de repos sur le raccordement de la déviation côté Conakry.

Ici à la base technique, on voit 49 dalles fabriquées sur les 52 dalles que le pont va contenir. Des ferrailleurs sont en train de faire les assemblages de fers pour les trois dalles restantes et qui doivent être coulées la semaine suivante. Une dalle pèse 23 tonnes. Après, ces dalles seront posées quand tous les pieux seront terminés. D’ici fin janvier 2024, dit le responsable de LEDUC, tout sera terminé et début février, ils vont lancer le pont ou pousser la structure métallique.

Le chantier du pont

Sur le chantier de la construction du pont, un peu plus en bas à environ 1km, l’on constate que le pont aura quatre appuis dont des culées sur chaque extrémité (C0 et C3) et deux piles (P1 et P2) qui doivent supporter la poutrelle. Sur chaque pile, on a environ 15 pieux. «Les culées sont terminées, donc deux appuis sont terminés. Troisième appui terminé aussi, on est en train de finir les injections. D’ici la fin de novembre, tout sera terminé. Vous allez voir les pieux qui seront debout et on attend, comme vous voyez que le niveau de l’eau est un peu élevé, on ne veut pas mettre du remblai, parce que dès que vous mettez du remblai, ça part avec la pluie. Ce qu’on va faire, c’est qu’on va attendre encore une semaine pour regarder si l’eau baisse, on va refaire la piste dans le fleuve pour repartir avec les grues, il reste trois pieux à finir sur la pile P2 dans le fleuve, 12 pieux sont déjà faits. Une fois que ce sera fini, on vient, on casse le béton qui est là parce qu’on avait un béton un peu plus haut pour pouvoir forer avec la machine et après on vient faire la semelle, ferraillée la semelle, faire la semelle et après on vient mettre les pieux. Une fois que les pieux sont terminés, on viendra faire le lançage. La structure métallique est déjà faite», explique le Directeur Travaux de Leduc et responsable de ce projet pour Leduc, Prithiviraj Ramat.

La structure métallique du pont a été fabriqué en France. Elle est venue dans des conteneurs de 40 pieds. Elle a été montée, soudé, peint et posé dans le sens définitif du pieu, du côté de la culée C3. «Sur la structure métallique, on a l’avant bèque et l’arrière bèque. L’avant bèque sert à lancer la structure métallique et l’arrière bèque sert à pousser le pont, pour le retenir, on pousse la structure métallique pour venir la poser sur la culée C0. Une fois que la structure métallique est poussée, elle est posée, on vient poser les dalles, on vient celer les dalles qui sont posées sur la structure métallique. Une fois que c’est fini, on vient mettre le goudron, la décoration, l’éclairage sur le pont, etc», nous indique-t-il.

Après la construction du pont, il y aura un poste de péage et pesage. Dans ce poste de péage, il y aura quatre voies allées, quatre voies retours. M. Prithiviraj Ramat évalue à plus de 51% le taux d’exécution des travaux du projet : «Si on regarde la globalité du projet, on est au-delà de 51% d’avancement de ce projet. Mais on peut avancer très rapidement si on commence à faire la route. Elle est déjà faite côté Conakry, côté Tanènè il reste à payer ou dédommager les gens».

Les voies d’accès du pont

Dans ce projet, Sogea Satom s’occupe des voies d’accès du pont, notamment la route, le bitumage et les ouvrages hydrauliques. Au départ, les voies d’accès étaient de 3,5 km avant d’aller à 7,5 km après le choix de l’option de contourner la ville de Tanènè. Une route communautaire de 800m a été rajoutée pour permettre aux habitants de Tanènè de rallier la contournante. A la base technique, les ouvriers sont en train de préparer le coffrage des ouvrages hydrauliques.

Entre le PK0 et le pont, les travaux ont commencé comme le terrassement, les déblais rocheux, c’est-à-dire le décapage, les déblais rocheux, la mise en place de l’assise est déjà prête. «Conformément à notre planning, dès la semaine prochaine, nous commençons la mise en œuvre du remblai. Il y a un côté un peu litigieux, c’est-à-dire du PK2 au PK7,500 où l’indemnisation des riverains n’est pas encore réalisée, aujourd’hui ça constitue un obstacle parce que nous souhaitons aller sur plusieurs fronts afin de respecter le délai contractuel prévu pour juin 2024. Nous avons déjà entamé les discussions avec l’administration du FER, on espère que la situation va se décanter dans les jours qui suivent. Aujourd’hui, comme point bloquant, c’est réellement cela. Tout le monde en est conscient et il n’y a pas mal de discussions qui ont été initiés», affirme M. Abdul Kader GUIAO, Directeur Travaux Sogea Satom.

La mission de contrôle des travaux

La mission de contrôle des travaux est assurée par le bureau ARTELIA. Il contrôle la qualité et surveille les travaux. «Nous validons les études d’exécution élaborées par l’entreprise, le plan d’assurance qualité, le plan de gestion environnementale et sociale. Tout ce qui est documents techniques et les procédures d’exécution des travaux, nous les validons. Après la validation, avant l’exécution, nous contrôlons l’installation des chantiers en ce qui concerne la mobilisation du matériel qui doit être mobilisé pour que le travail se fasse dans le délai, nous contrôlons aussi la mobilisation du personnel. Sur le terrain, nous participons à l’exécution en validant toutes les étapes. Nous avons des plans de contrôles. Suivant ces plans de contrôle, nous réceptionnons les travaux, nous donnons notre approbation pour tout ce qui doit être fait en termes de coffrage, ferraillage etc. Nous essayons aussi de suivre le planning d’exécution des travaux pour éviter qu’il y ait des retards. Nous faisons aussi le paiement des travaux exécutés par la vérification des métrées et des décomptes présentés par l’entreprise», a rappelé M. Adjinda A. Mafoya, chef du bureau ARTELIA. Sur la question de savoir si le délai sera respecté, il est sans ambages : «Bien sûr le délai va être respecté. L’administration nous a demandé des travaux supplémentaires. C’est-à-dire ils ont augmenté le linéaire du tronçon, ils ont ajouté une route communautaire qui doit être exécutée, ils ont demandé un poste péage et pesage plus grand. Donc au vu de ces travaux supplémentaires, l’administration est en train de prolonger le délai. Donc, le délai ça serait probablement fin juin 2024. A date, quand vous venez sur le chantier, vous voyez que les travaux se déroulent normalement. On pourra rester dans le délai. Y a-t-il des difficultés ? Les difficultés sur les chantiers ne manquent pas, mais à chaque fois qu’il y a des problèmes, l’administration essaie de les régler au fur et à mesure. Tout a été réglé jusque-là, sauf la libération de l’emprise du côté de Boffa, c’est-à-dire à partir du PK 2 vers le PK final. Tout le recensement a été fait, la procédure pour le paiement est en cours. Donc, dès que ce sera payé, l’entreprise pourra déployer les engins sur cette section », a-t-il conclu.

 

 

 

 

 

 

 

Le soulagement des citoyens de Tanènè

Selon les spécialistes, 20 000 véhicules traverseront par jour le pont unique. Les usagers de ce tronçon sont aux anges, surtout les populations de Tanènè. Alhassane Camara, chauffeur à Tanènè, affirme que la construction du pont unique est une très bonne chose. «Parce qu’ici au niveau des quatre ponts, tous les jours il y a embouteillage. Mais avec la construction du pont, les gens sont contents. Quand la construction du pont va finir, les usagers que nous sommes, chacun aura le choix où il veut passer. Soit on va sur l’ancienne route avec les quatre ponts et on se met dans l’embouteillage. Soit on va sur la nouvelle route avec le pont unique à péage et à pesage, on paie et on continue rapidement notre voyage. Personnellement, je suis content pour cela et je sais que les chauffeurs et les passagers sont pressés que le nouveau pont finisse», a-t-il déclaré.

Mamadou Saliou Diallo, éleveur à Tanènè, ne cache pas aussi ses sentiments. «Je suis content pour la construction du nouveau pont. Parce qu’on souffre depuis longtemps. Au niveau des quatre ponts, pour traverser avec les bœufs, les agents nous retirent 100 000 FG à l’allée, 100 000 FG au retour avec le camion vide. Autant de fois que tu va traverser, autant de fois tu vas payer. Mais avec la construction du nouveau pont, je suis content pour cela. Parce qu’on n’aura plus à payer cher», a renchéri l’éleveur Diallo.

Aboubacar Soumah, un autre citoyen de Tanènè, a ajouté : «Nous sommes très contents pour la construction du pont. Nous les usagers de cette route sommes contents. Mieux cette route n’est pas seulement pour nous les populations de Tanènè, elle est pour toute la Guinée et ses pays voisins. Jusqu’à maintenant, je n’ai pas vu quelqu’un qui est contre la construction de ce nouveau pont».

A la section syndicale transporteurs et mécanique générale de Tanènè, tout le monde salue la construction du pont unique. Son secrétaire général, a résumé : «S’il y a ceux qui sont plus concernés par la construction du pont, ce sont les chauffeurs. Le pont unique et la route qui contournent Tanènè et qui va sortir derrière, les gens pensent que Tanènè a été enfermé, mais Tanènè n’a été pas enfermé, plutôt Tanènè a été élargi. S’il n’y a qu’une seule voie dans une ville, c’est-à-dire une seule rentrée et une seule sortie, c’est un problème. Mais s’il y a une, deux ou trois voies d’accès, la ville s’élargisse, s’ouvre, elle n’est plus enfermée. La ville devient grande et c’est bénéfique pour les habitants de cette ville. Avec le pont unique, les chauffeurs auront la possibilité de choisir où ils veulent traverser. Le pont unique sera payant, mais il n’aura pas d’embouteillage. Quant aux quatre ponts, ils seront ouverts, mais si tu y vas, tu t’engages à souffrir dans l’éternel embouteillage que nous connaissons depuis plusieurs années maintenant. Puisque tout le monde veut traverser sans souffrir, le pont unique est très important pour les transporteurs. Nous demandons qu’ils accélèrent les travaux pour que nous aussi nous travaillons facilement. La route de quatre ponts est restreinte, mais le pont unique et ses voies d’accès seront larges, donc facilitera la traversée. Vivement la fin des travaux».

La livraison du pont unique et ses accès est prévue pour le 18 juin 2024. Soit dans 10 mois.

Souana Doré, envoyé spécial à Tanènè

(Reportage diffusé en exclusivité dans le magazine Emergence N°23 de Décembre 2023)