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Réduction des EPA en Guinée : une nécessité stratégique ou une mesure purement budgétaire ? ( Billet de la semaine)

Le gouvernement guinéen de transition a annoncé son intention de réduire le nombre d’établissements publics à caractère administratif (EPA) de 177 à 86. Cette décision, motivée par la volonté de réduire les dépenses publiques et d’améliorer l’efficacité de l’État, suscite des interrogations et des débats.

Si la réforme des EPA est nécessaire, il est impératif de ne pas la réduire à une simple opération comptable de réduction des effectifs ou des subventions. Une telle approche mécanique risquerait d’avoir des conséquences néfastes sur l’économie et la population guinéennes.

Rappelons que les EPA assurent une mission de service public essentielle. Les hôpitaux soignent, les universités forment, d’autres sont créés pour remplir des missions que le gouvernement et ses démembrements ne peuvent assumer seuls, conformément aux lois portant organisation de l’administration publique et gouvernance financière des EPA.

Avant de procéder à la fermeture ou à la fusion d’EPA, une évaluation approfondie de chaque entité est indispensable. Cette évaluation doit prendre en compte plusieurs critères, tels que :
La mission de l’EPA : L’EPA répond-il à un besoin réel du pays ? Sa mission est-elle clairement définie et pertinente ?

Les performances de l’EPA : L’EPA est-il efficace dans l’accomplissement de sa mission ? Produit-il des résultats concrets ?

L’impact social de la fermeture de l’EPA : La fermeture de l’EPA aura-t-elle des conséquences négatives sur les employés et les usagers ?

Il est également important de relativiser l’incidence financière de la réduction des EPA. Si les subventions versées aux EPA représentent un coût important pour le budget de l’État, il est important de noter que ces subventions ne sont pas le seul facteur explicatif des difficultés financières de l’État.

D’après la LFI 2024, au titre 4, les dépenses de transfert sont portées à 7 405,15 milliards de francs guinéens, dont 2 700 milliards en dépenses communes, 2 000 milliards pour l’eau et l’énergie, et 1 000 milliard pour l’éducation et la santé, soit 77% de dépenses rigides (où il est difficile de faire des économies).

D’autres mesures, telles que la lutte contre la corruption, la fraude et l’évasion fiscale, pourraient également contribuer à améliorer la situation budgétaire.
En conclusion, la réduction des EPA en Guinée est une mesure qui peut être bénéfique à condition qu’elle soit menée de manière réfléchie et stratégique. Il est important d’éviter une approche purement budgétaire qui risquerait d’avoir des conséquences négatives sur l’économie et la population. L’évaluation préalable des EPA, la prise en compte de l’impact social des fermetures et la relativisation de l’incidence financière de la mesure sont des éléments essentiels pour une réforme réussie.

Ne sacrifions pas l’efficacité du service public sur l’autel d’une simple réduction des dépenses. Réformons les EPA intelligemment pour un État plus performant et un service public de qualité au bénéfice de tous les Guinéens.

Cabinet Mocam