Voilà 7 ans que la société mauritanienne COFRIMA (Complexe Frigorifique de Mauritanie), filiale du groupe mauritanien AON a eu le contrat de gestion du seul complexe industriel de pêche en Guinée, SOGUIPÊCHE et actuel CIPECO, devant des sociétés locales comme Thiangui Pêche et autres, suite à un appel d’Offres lancé par l’État guinéen. Mais depuis, elle traine des pieds dans la mise en œuvre de ses engagements, au grand dam du secteur de la pêche.
La signature de ce fameux contrat a permis à Cofrima de ce bénéficier d’une concession de 15400 m2 dans le port autonome de Conakry, pour la construction et l’exploitation d’un complexe industriel de pêche et de commerce de Guinée.
Dans la convention signée entre les deux parties (État guinéen et COFRIMA), la société mauritanienne avait pris l’engagement de réaliser un investissement de 8.490.000 dollars américains. Et, qu’elle allait renouveler complètement l’infrastructure de pêche.
En effet, l’article 2 de l’agrément du projet de rénovation et de modernisation des installations du Complexe Industriel de Pêche et de Commerce de Guinée, délivré par le ministère de l’industrie sous l’ère de Hadja Fatoumata Binta Diallo en 2014, stipule que la société CIPECO-SA a l’obligation de :
– Réaliser le projet dans un délai de douze (12) mois et au plus tard dans un délai de trois (3) ans, à compter de la date de signature du présent arrêté, pour un coût total estimé à 60.653.250.000 Gnf, dont 53.653.250.000 Gnf en immobilisation et 7.000.000.000 Gnf en besoins en fonds de roulement, financé ainsi qu’il suit :
– Fonds propres : 60.653.250.000 GNF
– Emprunt : Néant
– Créer des emplois permanents pour 32 travailleurs dont 21 expatriés et des emplois contractuels pour 694 travailleurs dont 15 expatriés.
Projet prometteur sur papier, mais aucune réalisation palpable sur le terrain…
Selon Cherif Diallo, consultant pêche, la société mauritanienne COFRIMA avait promis d’envoyer vingt (20) bateaux de pêche industrielle. « Elle n’en a pas amené. Ça fait 7 ans. Il avait promis de quadrupler les cuves de carburants qui étaient là-bas. Donc, ils n’ont pas respecté leurs engagements contractuels. L’investissement n’a pas été fait. La société n’a jusqu’à présent pas procédé à la reconstruction du complexe industriel comme promis », a-t-il dénoncé au cours d’un entretien qu’il accordé à notre reporter.
Poursuivant l’ex Directeur Général de la SOGUIPÊCHE rappelle qu’il a une fois dit à l’ancien ministre de la Pêche et de l’aquaculture, André Loua, ‘’écoutes, Alpha Condé a enlevé Getma et a remis à Bolloré le contrat de concession du port, parce qu’il semblerait que Getma n’a pas respecté ses engagements contractuels au port. Pour SOGUIPECHE-là, c’est ce que vous devez faire. Si le groupe AON ne peut pas, prenez des Guinéens ». Je préfère qu’un Thiangui mange les biens de la Guinée, qu’un étranger le fasse’’, a-t-il rappelé.
Par ailleurs, Monsieur Cherif Diallo souligne que « le poisson qui est en mer ne vous appartient pas tant qu’il n’est pas dans votre assiette. Arrêtons de dire que la Guinée est riche en ressources halieutiques. On a une usine, qu’on investisse sur cette usine, et les bateaux viendront débarquer-là. Ça va créer de l’emploi. Que de vendre des licences de pêche à des Coréens et Chinois qui pêchent en mer et qui s’en vont. Ils prennent le carburant en mer, et les cartons aussi. C’est connu du ministère de la Pêche depuis des décennies », a-t-il déploré.
Le ministre des Pêche joue la prudence
Au cours de la conférence de presse que le ministre des Pêches, de l’aquaculture et de l’économie maritime a animé, lundi, 29 juillet 2019, à l’hôtel Kaloum, Frédéric Loua a reconnu certes que lors de l’installation de CIPECO, il y a eu des promesses et des engagements. Il a rappelé que la société vient de tenir son dernier conseil d’administration en mois de juillet à Conakry.
Le ministre des Pêches avait dit : « nous sommes en train de suivre CIPECO. Nous allons évaluer qu’est-ce qui ne va pas. Qu’est-ce que l’État peut faire pour CIPECO. Sinon, quelles dispositions prendre », a-t-il promis.
Poursuivant, « je suis d’accord que depuis 2012, ce contrat a été signé. Il y avait un tunnel qui servait à approvisionner les bateaux, il y avait aussi des dispositifs pour faciliter l’accostage. Mais CIPECO aussi a souffert de certaines choses. Au début, un prix a été fixé pour la conservation des produits. Je crois que c’étaient 1000 gnf par carton. Depuis cette époque, les gens ne veulent pas que ce prix change, et ça a une conséquence terrible sur la vie de l’entreprise », a dénoncé le ministre des Pêches.
Par ailleurs, Frédéric Loua a souligné aussi que tout dernièrement, il y a eu une panne au niveau de CIPECO, il y avait plus de 2000 tonnes qui étaient-là entreposées, dit-il. « Comme il n’y avait pas de courant, il fallait aller louer un grand groupe électrogène. CIPECO payait 10 millions Gnf de carburant par jour, pour satisfaire les mareyeuses », dira-t-il.
Le ministre des Pêches, de l’aquaculture et de l’économie maritime précise cependant : « nous sommes en train de prendre des dispositions. Si l’État est vraiment perdant dans cette organisation, nous prendrons nos dispositions », assure Frédéric Loua.
Il faut rappeler que la convention de privatisation de la Nouvelle SOGUIPÊCHE entre la République de Guinée et la société COPRIMA a été signé » le 10 avril 2012. Elle a été paraphée par le PCA de COPRIMA, Mohamed Lamine Abdellahi Noeigued, l’Administrateur Général de l’ACGP (Administration et Contrôle des Grands Projets), Mamadi Condé, le ministre de la Pêche et de l’aquaculture d’alors, Moussa Condé, et approuvé par le ministère de l’Economie et des finances du gouvernement Saïdou Fofana, Kerfalla Yansané.
Mamadou Alpha Baldé In Emergence Mag N°06 d’Août 2019