Emergence – Tension maximale à Électricité de Guinée. La gestion du directeur générale de la société étatique est épinglée par un rapport de dix pages établi par le Conseil d’administration. A la lecture du document, le divorce semble consommé entre les deux parties. Emergence vous explique.
Nommé à la tête d’EDG il y a un an, Laye Sékou Camara, est plus que jamais sur la sellette. Le Conseil d’administration qui vient de lui adresser un courrier, l’invite à retrouver très rapidement les fondamentaux d’une gouvernance vertueuse.
Dans la missive dont Emergence détient copie et portant la signature de son président Ismaël Kéita, le Conseil d’administration, justifie sa démarché par l’obligation de s’autosaisir de toute question qui intéresse la bonne marche d’EDG. Des obligations qui partent, précise-t-il, des contrôles et des vérifications sur les activités et les contrats, à l’arrêt des états financiers de l’entreprise.
Passée cette mise au point, le Conseil d’administration signifie au directeur général la difficile relation de collaboration dans sa tentative visant à redresser l’Électricité de Guinée. Il regrette clairement le manque de coopération des dirigeants de l’entité.
Le CA ne s’arrête pas là. Il met aussi à nu la politique de recrutement au sein de l’entreprise qu’il dit ne plus respecter les principes. « Vous avez procédé à plusieurs nominations des cadres sans recueillir l’approbation du Conseil d’administration d’EDG et à date, les évaluations demandées de ces cadres ne nous sont toujours pas parvenues. (…) Vous ne respectez pas l’Article 26 des statuts d’EDG s’agissant des documents que vous devez adresser au Conseil d’administration d’EDG avant toute réunion », indique le rapport qui fustige aussi la mise en œuvre tardive des résolutions prises lors des précédentes cessions.
« Nous n’avons aucune visibilité sur les contrats signés au nom d’EDG et dépassant le seuil de 10 milliards de francs guinéens »
Contrats opaques
Tout laisse à croire que l’atmosphère est électrique. Sur l’aspect financier, le rapport est très caustique. Sans prendre de gants, le président du Conseil d’administration reproche au patron d’EDG, une gestion opaque des contrats qui engagent la société. « Nous n’avons aucune visibilité sur les contrats signés au nom d’EDG et dépassant le seuil de 10 milliards de francs guinéens, seuil au dessus duquel l’approbation du Conseil d’administration est requise », rappelle Ismaël Kéita.
A ce tableau déjà assez sombre, s’ajoute l’utilisation de logiciels comptables inadaptés, l’absence de données et une « gestion en vase clos », selon le rapport.
Plus compliqué encore, le C.A dit son incompréhension du fait de l’absence du budget de fonction et d’investissement pour 2023 qu’il doit en principe approuvé avant le début de l’exercice. « Cette situation plus qu’inacceptable engage pleinement la responsabilité de la direction d’EDG. »
Responsabilité pénale
Le Conseil d’administration est clair dans son rapport dont copie est transmise aux ministres en charge de l’Économie et de l’Energie. La gestion administrative et financière telle que conduite, expose le directeur général d’Électricité de Guinée à des risques judiciaires.
« J’attire particulièrement votre attention sur le plus grand retard qu’accuse la production des états financiers des exercices 2021 et 2022. Cette situation ne nous permet, ni à vous, ni à nous en tant que Conseil d’administration, ni à l’Action Unique qui maintient actuellement EDG sous perfusion financière, d’avoir une visibilité sur la réelle santé financière d’EDG. Sans cette visibilité, la prise de mesures les plus idoines est difficile ». Dès lors, prévient-il, « vous vous exposez dans ce contexte de carence de production des états financiers aux conséquences pénales résultants de manquements à vos obligations sociales, comptables et financières. »
Tout en rappelant que l’EDG a besoin d’une gouvernance saine et rigoureuse au regard des défis à relever, les administrateurs se désolidarisent ouvertement de la gestion qu’ils jugent cavalière. Et finissent par prévenir qu’en aucun cas, leurs responsabilités pénales et ou civiles ne sauraient être engagées par les manquements dénoncés.
Samuel Camara