Émergence – Malgré la pandémie de Coronavirus qui frappe toutes les économies et dérèglent les projections, le président guinéen Alpha Condé veut donner au projet de création de la monnaie unique « Eco » sa chance de devenir une réalité en Afrique de l’Ouest. Mais pas avant quelques explications.
Le projet de création de l’Eco, la monnaie unique devant l’Afrique de l’Ouest, était au centre d’une visioconférence organisée mardi entre les présidents guinéen, Nigérian, Ghanéen, Leonais, Gambien et le Libérien.
Dans un contexte marqué par la crise sanitaire de Covid-19 et des hésitations parmi les dirigeants de l’espace communautaire pour le rôle jugé peu sincère par la Côte d’Ivoire et la France dans la mise en route de la future monnaie commune, les six chefs d’Etat de la ZMAO (seconde zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest après l’UEMOA), se veulent toujours confiants.
Le Président Alpha Condé a rappelé la nécessité d’ouvrer pour l’intégration sous-régionale qui demeure, selon lui, « fondamentale » pour le développement de l’Afrique de l’Ouest. « Il est extrêmement important que nous arrivions à mettre en place l’Eco. Bien sûr, la maladie Covid-19 a atteint nos économies, mais nous devons avoir la possibilité de l’appliquer soit avant le 5 décembre 2020, soit de nous donner une marge. Mais nous devons demander à nos frères de l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) de respecter la décision que nous avons prise à 15 », a-t-il déclaré pendant son entretien avec ses cinq homologues. « Nous avons été un peu surpris de la déclaration d’Abidjan et dernièrement de celle de Paris. Donc, il est extrêmement important, pour clarifier les choses, que le Président du Ghana demande une visioconférence entre les 15 Chefs d’État ».
Mais pour mieux cerner les choses devant être clarifiées, il faut remonter au 21 décembre dernier. Alors en visite à Paris, le président ivoirien Alhassane Ouattara et son homologue français Emmanuel Macron surprennent le monde en annonçant la fin du franc CFA et son remplacement par l’Eco. « Par un accord avec les autres chefs d’État de l’UEMOA, nous avons décidé de faire une réforme du franc CFA avec les trois changements majeurs suivants : tout d’abord, le changement du nom de la monnaie du franc CFA à l’Eco. Deuxièmement l’arrêt de la centralisation de 50% de nos réserves de change au Trésor et la fermeture du compte d’opération. Troisièmement le retrait des représentants de la France de tous les organes de décision et de gestion de l’UEMOA », a déclare Alhassane Ouattara.
L’annonce de la grande réforme du franc CFA, hérité de la colonisation, a à la fois surpris et créé un malaise en Afrique de l’Ouest d’autant qu’elle était faite à partir de la France, en présence du président français.
En se réunissant par visioconférence ce mardi, les Chefs d’Etat de Guinée, du Nigéria, du Ghana, du Liberia, de la Sierra Léone et de la Gambie s’invitent donc officiellement dans ce sujet qui alimente les débats depuis six mois. Ils ont exprimé, à l’occasion, leur surprise d’écouter la déclaration issue de la rencontre entre les présidents ivoirien et français. « Nous avons été un peu surpris de la déclaration d’Abidjan et dernièrement de celle de Paris. Donc, il est extrêmement important pour clarifier les choses que le Président du Ghana demande une visioconférence entre les 15 Chefs d’État », a rapporté Alpha Condé. Et le président guinéen de conclure : « Il est évident pour la Guinée que l’Eco reste la monnaie des 15 États de la CEDEAO. En aucun cas la Guinée ne saurait adhérer à une zone monétaire sans les 15 États. Cette position est claire. »
Ousmane Sylla