Élu début mars à la tête du Nigeria, Bola Ahmed Tinubu, a été investi président le lundi 29 mai, à Abuja. Connu pour son sens des affaires, celui qui dirige aujourd’hui la première puissance économique du continent africain a failli de peu prendre le contrôle de quelques mines en Guinée. Emergence vous révèle les contours de l’affaire.
Tout s’accélère en 2015. Le président guinéen Alpha Condé cherche à être réélu pour la seconde fois à la tête du pays. Proche de Bola Tinubu, le chef de l’Etat guinéen fait appel au puissant homme d’affaires, avec qui il entretient une amitié depuis des années.
Surnommé « Faiseur de roi » dans son pays pour sa capacité à porter un président au pouvoir, Tinubu accepte d’apporter conseils et « appui technique » pour améliorer la communication du candidat à sa propre succession. Le résultat sera sans équivoque. Le président Condé est réélu dès le premier tour du scrutin avec 57,8%.
Des interrogations
Bola Tinubu était déjà un visiteur VIP au palais Sèkhoureyah. En homme d’affaires averti, il profite de sa proximité avec Alpha Condé nouvellement réélu pour manifester son intention d’investir en Guinée. Les discussions avec les autorités guinéennes porteront sur plusieurs secteurs.
Une source qui a suivi le dossier de près a confié à Emergence que les équipes du nigérian ont eu des échanges avec les agents techniques du ministère des Mines et de la Géologie. « La société de Tinubu demandait des permis dans l’or et dans la bauxite », confie notre interlocuteur.
Pour la suite, la procédure ne prospère pas. Le processus de demande de permis, sans être formellement transmis au ministère des Mines, va s’estomper.
L’investisseur nigérian a-t-il été découragé par la politique guinéenne ? Pourquoi son grand ami et président guinéen d’alors, Alpha Condé, n’a pas pesé de tout son poids dans l’attribution des permis ? Nos informations n’apportent aucune réponse claire.
Mais une source que nous avons contactée et qui a suivi les premières discussions est catégorique sur la question. Si la démarche n’a pas prospéré, c’est bien parce que l’entreprise de Tinubu Bola n’a plus montré un intérêt réel. « Les affaires de Tinubu n’ont pas prospéré en Guinée. Je crois qu’ils ont abandonné la procédure », confie-t-elle, tout en dégageant toute responsabilité de la partie guinéenne.
Une présidence qui démarre sur les chapeaux de roues
Si ses affaires semblent ne pas avoir réussi en Guinée, Bola Tinubu entame sa présidence à la tête du pays le plus peuplé d’Afrique avec des décisions fortes. Le nouveau leader du Nigeria qui a promis lors de son investiture d’unifier le pays, de lutter contre la corruption, de créer de l’emploi et des opportunités économiques a commencé ses réformes par la suppression de la subvention du carburant. Le Nigeria dépensait quotidiennement près de 18,39 milliards de nairas (40 millions de dollars) pour subventionner le carburant.
Cette nouvelle disposition est suivie en juin par l’arrestation spectaculaire du gouverneur de la Banque centrale du Nigeria, Godwin Emefiele, pour corruption, blanchiment d’argent et détournements de fonds.
Comme pour signifier que son avènement augure des perspectives prometteuses pour le Nigeria dans la lutte contre la corruption, Bola Tinubu, a suspendu le 15 juin, le Chef de la Commission des crimes économiques et financiers Abdul Rasheed Bawa. Visé par une enquête pour abus de pouvoir, Bawa a été remplacé par le directeur des opérations de la Commission, qui en aura la responsabilité jusqu’à la conclusion de l’enquête.
In Emergence Magazine N°21 / Juillet 2023