La faillite de la Silicon Valley Bank, et la nécessité qui en découle d’assurer la stabilité financière, affaiblit encore le jeu de l’institution présidée par Jerome Powell.
L’inflation baisse, mais, à 6 % en février, elle est encore trop élevée. Et le piège se referme sur la Fed, la banque centrale américaine. L’institution présidée par Jerome Powell doit augmenter ses taux, actuellement fixés au-dessus de 4,5 %, pour continuer de lutter contre la hausse généralisée des prix. Mais cette politique a conduit à la faillite de la banque de Californie Silicon Valley Bank (SVB), dont le portefeuille d’obligations avait perdu plus de 15 %. Entre inflation et stabilité financière, la Fed va-t-elle devoir choisir ?
L’indice américain des prix à la consommation de février, publié mardi 14 mars, n’apporte pas de réponse décisive. Sur un an, l’inflation a atteint 6 %, contre 6,5 % en janvier, et 5,5 % hors énergie et alimentation. La décrue est sensible par rapport au record de 9,1 % atteint en juin 2022. Mais au mois le mois, la tendance reste trop forte par rapport à l’objectif de 2 % que la banque centrale dit vouloir atteindre : les prix ont encore augmenté de 0,4 % entre janvier et février, et ce chiffre atteint 0,5 % hors énergie et alimentation. L’inquiétude reste vive pour les prix du logement (+ 0,8 %), tandis que la hausse dans les autres services accélère de nouveau. L’inflation est « toujours trop haute et n’indique aucun signe de chute », déplore Jason Furman, économiste de Harvard.
Dans ce contexte, que fera la Fed à l’issue de la prochaine réunion de son comité de politique monétaire, le 22 mars ? Avant la faillite de la SVB, elle était partie sur une hausse d’un demi-point pour tenter de reprendre en main la situation après de mauvais chiffres de l’inflation. « J’ai tout le respect pour Powell, mais le fait est que nous avons un peu perdu le contrôle de l’inflation », avait reproché le patron de J.P. Morgan, Jamie Dimon. La bonne tenue de l’emploi et la persistance de l’inflation en février auraient dû la conforter, mais la déconfiture de la SVB vient brutalement rendre sa tâche quasi inextricable.
Effondrement des taux de marché
L’impact de cette faillite, la plus grave depuis 2008, est plus compliqué à évaluer qu’il n’y paraît : en apparence, elle va empêcher la Fed de monter ses taux, car ce serait prendre le risque d’aggraver les pertes des institutions financières qui ont acheté des bons du Trésor en période d’argent gratuit et dont la valeur a perdu parfois plus de 15 % (lorsque les taux montent, la valeur des obligations baisse jusqu’à ce qu’elles approchent le rendement des nouveaux taux de marché, le taux de rendement étant le rapport du montant des versements d’intérêts sur le cours de l’obligation).
Sauf que la réalité à Wall Street est bien différente : dans la panique, les taux de marché se sont effondrés depuis une semaine, les opérateurs fuyant le risque et acceptant une moindre rémunération en achetant à n’importe quel prix des bons du Trésor. Ainsi, depuis début mars, les taux à dix ans sont tombés de 4 % à 3,6 %, et ceux à deux ans ont reculé de plus de 5 % à 4,2 %. Cette détente massive réduit les pertes des portefeuilles obligataires, mais elle produit l’exact inverse de la politique souhaitée par la Fed, qui veut refroidir l’économie en renchérissant le loyer de l’argent.
Depuis l’été 2022, les marchés se jouent de Jerome Powell, profitant de toute occasion pour rebondir, persuadés qu’il craquera et n’augmentera pas ses taux comme prévu. Sans cesse, ils cherchent à faire baisser les taux et à augmenter la valeur des actions, ce qui remet du carburant dans l’économie. A chaque fois, il y a un bon prétexte : l’inflation aurait disparu, la récession qui s’annonce sera telle qu’il faudra vite soutenir l’économie et baisser de nouveau les taux, ou encore la Fed vole toujours au secours des marchés financiers quand survient un accident.
L’inflation baisse, mais, à 6 % en février, elle est encore trop élevée. Et le piège se referme sur la Fed, la banque centrale américaine. L’institution présidée par Jerome Powell doit augmenter ses taux, actuellement fixés au-dessus de 4,5 %, pour continuer de lutter contre la hausse généralisée des prix. Mais cette politique a conduit à la faillite de la banque de Californie Silicon Valley Bank (SVB), dont le portefeuille d’obligations avait perdu plus de 15 %. Entre inflation et stabilité financière, la Fed va-t-elle devoir choisir ?
Effondrement des taux de marché
L’impact de cette faillite, la plus grave depuis 2008, est plus compliqué à évaluer qu’il n’y paraît : en apparence, elle va empêcher la Fed de monter ses taux, car ce serait prendre le risque d’aggraver les pertes des institutions financières qui ont acheté des bons du Trésor en période d’argent gratuit et dont la valeur a perdu parfois plus de 15 % (lorsque les taux montent, la valeur des obligations baisse jusqu’à ce qu’elles approchent le rendement des nouveaux taux de marché, le taux de rendement étant le rapport du montant des versements d’intérêts sur le cours de l’obligation).Sauf que la réalité à Wall Street est bien différente : dans la panique, les taux de marché se sont effondrés depuis une semaine, les opérateurs fuyant le risque et acceptant une moindre rémunération en achetant à n’importe quel prix des bons du Trésor. Ainsi, depuis début mars, les taux à dix ans sont tombés de 4 % à 3,6 %, et ceux à deux ans ont reculé de plus de 5 % à 4,2 %. Cette détente massive réduit les pertes des portefeuilles obligataires, mais elle produit l’exact inverse de la politique souhaitée par la Fed, qui veut refroidir l’économie en renchérissant le loyer de l’argent.Depuis l’été 2022, les marchés se jouent de Jerome Powell, profitant de toute occasion pour rebondir, persuadés qu’il craquera et n’augmentera pas ses taux comme prévu. Sans cesse, ils cherchent à faire baisser les taux et à augmenter la valeur des actions, ce qui remet du carburant dans l’économie. A chaque fois, il y a un bon prétexte : l’inflation aurait disparu, la récession qui s’annonce sera telle qu’il faudra vite soutenir l’économie et baisser de nouveau les taux, ou encore la Fed vole toujours au secours des marchés financiers quand survient un accident.
Paris sur une pause de la Fed
Cet adage est juste depuis 1987, lorsque la Fed sauva Wall Street après un krach qui fit ressurgir le spectre de 1929 mais dont les conséquences furent finalement éphémères. Toutefois, c’était une époque où l’inflation était déjà en grande partie vaincue. Lorsque l’inflation est là, elle s’impose comme priorité absolue : à partir de 1979, l’illustre prédécesseur de M. Powell, Paul Volcker, n’avait pas hésité à laisser s’envoler les taux jusqu’à 20 %, provoquant une première récession en 1980 puis une seconde fin 1981-début 1982, la première purge n’ayant pas été suffisante. Au prix d’un chômage supérieur à 10 %.Et l’on peut ajouter que, si la crise bancaire est réellement confinée, comme semblait en attester la remontée en flèche des actions de petites banques américaines mardi 14 mars, la Fed n’a pas de raison d’avoir la main qui flanche.Pourtant, de nouveau, les marchés parient sur la peur de la Fed et excluent désormais une hausse d’un demi-point. Ils tablent sur une augmentation limitée à 0,25 point, voire une pause. Jason Furman déconseille vivement cette option. « Une pause de la Fed exacerberait les risques pour la stabilité financière », estime l’économiste, qui cite le risque d’avoir besoin de remonter plus tard les taux plus fortement et plus rapidement, ainsi que celui de « créer une déconnexion dangereuse entre les attentes du marché et les actions futures probables ». L’inflation, les banques imprudentes et la défiance des marchés : M. Powell se bat désormais sur trois fronts. En attendant que le chômage, qui est encore à ses plus bas depuis la fin des années 1960, ne s’invite dans la conversation.
AFP