Energie : la production hydroélectrique de la Guinée à l’épreuve du changement climatique

Emergence – Souapiti et Kaléta, les deux grands barrages qui ont assuré 86% de la production énergétique de la Guinée en 2023, tournent présentement à bas régime, provoquant une chute drastique de la production. En cause, la baisse du niveau des retenues d’eau.

 

A Souapiti, ce 3 juillet, seule une turbine sur les quatre du barrage tournait à plein régime, produisant 112,5 mégawatts. Soit le quart de la capacité installée. « Les trois autres groupes à l’arrêt entrainent un manque à gagner de 337,5 mégawatts », nous glisse un ingénieur.

Si l’imposant barrage de 450 MW ne parvient plus à faire tourner toutes turbines, c’est bien parce que le niveau de sa retenue d’eau frôle aujourd’hui le seuil critique. La côte normale pour atteindre toute la capacité de production est de 210 mètres. Mais la hauteur actuelle avoisine 185,5 mètres.

 

Cette baisse de la quantité d’eau résulte de deux facteurs, d’après les informations recueillies sur place. D’abord, la mauvaise pluviométrie due aux effets pervers du changements climatique, puis le pompage excessif effectué après l’explosion du dépôt des hydrocarbures à Conakry en décembre pour répondre à la forte demande. Cette explosion, rappelons-le, a mis hors-service quelques groupes thermiques et entrainé une pénurie de HFO.

La crise d’eau à Souapiti affecte aussi Kaléta, situé à 6km en aval. Là aussi, d’une capacité de 240 mégawatts, l’infrastructure énergétique ne parvient plus à faire tourner qu’une turbine sur trois, mettant seulement quelques 80 mégawatts sur le réseau.

« Aujourd’hui nous avons un déficit énorme », révèle le ministre de l’Energie, de l’Hydraulique et des Hydrocarbures Aboubacar Camara qui effectuait une visite de terrain. « Certains pensent que Kaléta et Souapiti est un refus. Non, ce n’est pas le cas. Je ne vois aucun gouvernement, aucune autorité priver sa population d’électricité s’il n’y a pas de difficultés », ajoute-t-il, tout en interpellant les citoyens au calme et à la résilience.

 

« Pas de panne »

Cette situation conjuguée à l’explosion du dépôt des hydrocarbures entraine un déficit de production estimée à 638 mégawatts à la pointe.

 

La baisse de la production oblige Electricité de Guinée (EDG) a élaborer un plan de délestage.

A Souapiti et à Kaléta, seules deux turbines sur sept tournent à plein régime.

 

Mais le ministre est formel. Les deux barrages ne sont pas en panne. Si la majorité des turbines est à l’arrêt, c’est que les défis sont en partie hydraulique. « Aucune turbine n’est à l’arrêt du fait d’une panne.

 

Aujourd’hui, le gouvernement multiplie les initiatives pour résorber la crise de manière durable, explique le ministre Aboubacar Camara. Une stratégique qui passe à la fois par la réparation des groupes thermiques en panne à Conakry, un investissement dans le solaire et une restructuration profonde de l’Electricité de Guinée (EDG).

 

« Nous préférons travailler et surprendre. Le gouvernement n’est plus en train de réfléchir, mais il est dans la solution. Nous sommes en train de travailler pour apporter des solutions à court, moyen et long terme », dit-il. « Il y a plusieurs facteurs qui font qu’on s’est retrouvé dans cette crise. Mais le plus important est de savoir tirer les leçons pour ne plus nous replonger dans la même crise. Et cela demande des solutions adaptées. Ces solutions, si nous les prenons aujourd’hui à la hâte, ce sont les mêmes populations qui font nous critiquer parce que notre besoin ne sera pas résolu », lance-t-il.

 

Nous y reviendrons.

 

Samuel Camara