Energie : en Guinée, un réajustement tarifaire s’impose

C’est une pilule difficile à avaler. Mais il le faut. Pour un équilibre financier du secteur énergétique, plusieurs actions courageuses sont nécessaires. Parmi celles-ci, figure bien évidemment l’épineux défi relatif au réajustement des tarifs. Explications.

Aux États généraux de l’énergie organisés du 7 au 9 juin à Conakry, dirigeants et investisseurs du secteur ont, sans ambages, réussi à poser le diagnostic à savoir : un faible taux d’électrification et un déséquilibre entre l’offre et la demande. Pour inverser cette réalité qui persiste depuis des décennies, en dépit des investissements significatifs de l’Etat, des réflexions sérieuses doivent être menées sur l’apport économique du secteur énergétique.

Au cours du panel intitulé «Les enjeux économiques et financiers, et impact sur les finances publiques», il a été démontré que le secteur énergétique guinéen a besoin, dans l’urgence, des actions structurelles et des interventions planifiées de l’Etat. Cela devrait passer nécessairement par une augmentation du tarif de vente de l’électricité aux consommateurs. Il ne faut pas se voiler la face. La Guinée propose les tarifs domestiques monophasés et triphasés les plus bas en Afrique de l’Ouest alors que le pays détient le coût de production le plus élevé.

Des données récoltées en 2019 révèlent que le coût de production de l’énergie en Guinée varie entre 12 et 16 cents USD par kilowattheure. Alors que dans le même temps, la Côte d’ivoire achète le même kilowattheure à 7 – 9 cents USD, le Ghana, 9 cents USD et le Nigéria : 6 – 8 cents USD.

Mais paradoxalement, le prix de vente d’électricité reste le plus faible. Avec un prix moyen de vente 845 GNF/KWh alors même que le coût de revient moyen avoisine 1852 GNF/KWh, les revenus de la vente d’électricité sont loin de couvrir le coût de service. En clair, l’exploitation est largement déficitaire.

Plus l’Électricité de Guinée vend de l’électricité, plus elle perd de l’argent. Le prix moyen de vente ne couvre que 45% du coût de revient. Le manque à gagner est couvert par la subvention de l’Etat.

Rehausser le prix de l’électricité

La principale mesure qui s’impose et que l’Etat se doit de prendre reste le réajustement tarifaire de l’électricité.

Longtemps voulue par le couple FMI et Banque mondiale, le gouvernement a l’obligation de passer par cette voie pour couvrir les  dépenses d’exploitation et celles liées aux investissements, ainsi qu’au service de la dette. Une étude menée par EDG préconise par exemple que le prix de vente moyen soit revu à la hausse de 30 % sur trois années consécutives avec un changement de structures tarifaires. Ce qui permettrait de passer de 500 GNF/ KWH à 3000 GNF/KWH.

Les débats ont aussi suscité des scenarios visant à redresser le secteur.

Ainsi, l’Etat devra par exemple faire recours au chéquier pour injecter 3 000 milliards de francs guinéens dans la recapitalisation d’EDG.

Ces réformes structurelles ne suffisent pas. Des actions visant à améliorer la performance opérationnelle d’EDG doivent être également envisagées.

Celles-ci devront passer par une augmentation du rendement du réseau, la réduction des charges d’exploitation et l’amélioration du taux de recouvrement. Par ailleurs, elles devraient mettre en place une stratégie de généralisation des compteurs chez les abonnés pour lutter contre la facturation forfaitaire, accentuer la lutte contre la fraude et réduire les pertes techniques et commerciales.

Emergence Mag N°21/ Juillet 2023