Conseil des Ministres Acte 2: (Par Mohamed CAMARA)

Au cours du Conseil des Ministres hebdomadaire du jeudi 2 décembre 202, le Chef de l’État, le Président de la Transition, Président du CNRD a demandé au gouvernement de réfléchir sur la problématique de la desserte en eau de la capitale et environs.

Le Conseil a aussi inviter à réfléchir sur la fiscalité des domaines publics maritimes DPM, à réfléchir sur une fiscalité des loyers pour pour résoudre le problème de logements à Conakry.

Votre cabinet citoyen s’efforce à vous éclairer sur ces problématiques :

1- CONTRIBUTION FONCIERE UNIQUE (art. 257 – 274 CGI)

  1. Définition : Une contribution annuelle sur les propriétés bâties et non bâties est instituée au profit du Budget National et du Budget des collectivités locales, dénommée Contribution Foncière Unique (CFU). C’est un impôt synthétique qui regroupe l’impôt sur le foncier bâtis et non bâtis, la taxe d’habitation et l’impôt sur les revenus fonciers. Ces taux sont de :
  2. Taux :

2% de la valeur locative si l’immeuble est haitable mais non occupé; (LFI 2019)

5% de la valeur locative si l’immeuble est occupé par son propriétaire;

10% de la valeur locative si l’immeuble est occupé par le propriétaire pour usage professionnel;

15% de la valeur locative si l’immeuble est mis en location.

De ce qui précède : 2% de la valeur locative si l’immeuble est haitable mais non occupé; (LFI 2019)

On aura compris, celui qui a une maison fini et ne loue pas, il doit payer 2% de la valeur locative.

La question est de savoir s’il faut augmenter ce taux ou alors créer une nouvelle taxe ? La balle est dans le camp du Gouvernement!

2- La réflexion sur une fiscalité des domaines publics maritimes

Le domaine public maritime (DPM) est constitué du rivage de la mer et du sol et du sous-sol de la mer jusqu’à la limite des eaux territoriales, ainsi que des lais et relais de la mer. Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu’elle couvre et découvre jusqu’où les plus hautes mers peuvent s’étendre en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles.

Le domaine public maritime (DPM) est constitué :

du rivage de la mer, c’est à dire tout ce qu’elle couvre et découvre en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; du sol et du sous-sol de la mer jusqu’à la limite des eaux territoriales ;

Le domaine public maritime est aujourd’hui le rendez-vous des politiques intégrant la préservation de l’environnement et l’aménagement du territoire. C’est un espace à la fois sensible et riche en ressources. Son usage est public, mais il peut être modifié sous certaines conditions. Le cordon littoral, cette délicate rencontre entre la terre et la mer, est particulièrement convoité.  il doit aujourd’hui être géré à travers le triple prisme du développement durable : économie, préservation de la biodiversité, aspirations sociales. Garantir le libre accès du littoral au public, par nature inaliénable et imprescriptible, et assurer sa conservation, demeurent les enjeux majeurs de la gestion domaniale.

Le domaine public naturel couvre la mer territoriale, les eaux intérieures les rivages de la mer couverts lors des plus fortes marées, les cours d’eaux navigables dans les limites déterminées par la hauteur des eaux coulant à pleins bords avant de déborder ainsi qu’une zone de 100 ou 300m de large à partir de ces limites sur chaque rive. Ce domaine public naturel est simplement déterminé par la simple constatation de leur situation par rapport à des phénomènes naturels présents (le rivage, les lais de mer, les relais de mer, les lacs, les étangs, les estuaires et les estrans).

Le domaine public artificiel, pour sa part, relève de tout ce qui est lié aux installations portuaires ou implantées dans l’intérêt de la navigation maritime. Exemple : Les ports maritimes et fluviaux avec leurs dépendances immédiates et nécessaires, les digues, les môles, les terre-pleins, les écluses, les sémaphores et les phares maritimes.

Les modes de gestion du Domaine Public Maritime :

Pour la protection du Domaine Public Maritime, l’Etat fait appel à des principes fondamentaux à savoir : Le principe de l’inaliénabilité du DPM, le principe de l’imprescriptibilité du DPM.

Le principe de l’inaliénabilité du domaine public maritime est un principe qui protège le domaine public contre l’aliénation ou sa vente. Ce principe précise que le domaine public maritime ne peut être ni vendu, ni cédé et ni être usurpé par qui que ce soit. Ce domaine est insaisissable et inaliénable. Ce principe permet à l’Etat de conserver le domaine pour l’intérêt de tout le monde. Ce principe bénéficie d’une très forte légitimité qui provient de l’ordonnance de Colbert de 1681. Je vous renvoie à l’article 34 du code maritime de 2018 pour en savoir davantage.

En ce qui le concerne, le principe de l’imprescriptibilité du DPM vise à protéger le domaine notamment contre tous les mécanismes de prescriptions acquisitives, (voir le code foncier domanial guinéen et surtout la jurisprudence du conseil d’Etat français du 13 octobre 1967).

La procédure d’occupation du Domaine Public Maritime :

Pour occuper le domaine public maritime, il y’a un certain nombre de principes qui sont entre autres :

l’autorisation d’occupation du DPM : Cette autorisation est accordée à titre personnel. Cette autorisation est caractérisée par une précarité et une révocabilité parce que tout simplement le titre accordant l’autorisation peut-être retiré à tout moment pour une cause d’utilité publique. L’acte accordant l’autorisation précise les conditions d’utilisation du domaine qui fait l’objet d’une vérification correcte et efficace.Les conditions d’utilisation sont entre autres : Le principe de libre accès et de la gratuité du public aux plages et dulibre accès au rivage ; l’interdiction de porter atteinte à l’état naturel du rivage de la mer ; l’entretien du milieu pour la lutte contre la salubrité du domaine.

L’autorisation d’occupation temporaire du domaine public maritime: Cette autorisation est un document accordé à des personnes publiques ou privées pour l’aménagement, l’organisation et la gestion du domaine.

Le principe de concession : Sur cet aspect, il y’a des possibilités de privatisation exceptionnelle et à titre précaire. On parlera alors de concessions privées. Ainsi, à ce niveau, l’Etat peut accorder sur le domaine public maritime des concessions ayant pour objet l’aménagement et l’exploitation. Exemple : La construction d’une infrastructure portuaire.

Le concessionnaire est autorisé à occuper une partie de l’espace concédé pour y installer et exploiter des activités destinées à répondre aux besoins du service public. La durée de la concession dépendra du type de contrat.

3-  Du bail emphytéotique

Petit rappel de la loi:

Art.17.- Le bail emphytéotique est une convention de longue durée, comprise entre 15 et 99 ans, qui confère au preneur un droit réel immobilier susceptible d’hypothèque. Ce droit peut être saisi et cédé.

Art.20.- Les immeubles du domaine privé de l’Etat ou des autres personnes publiques peuvent être donnés à bail emphytéotique.

Art.22.- L’emphytéote est tenu de toutes les contributions et charges des biens immeubles, notamment des contributions foncières. Quand le Président invite ses Ministres des finances et de l’habitat, c’est pour réfléchir sur les modalités de revoir les contributions sur les baux.

Le conseil invite les Ministres de l’habitat et de l’économie à revoir l’arrêté conjoint sur le bail emphytéotique. Tout porte à croire que c’est pour revenir sur les tarifs des redevances.

4- La problématique de l’eau dans la capitale et environs :

  «la détérioration significative de la qualité du service dans toutes les villes actuellement desservies par la Société des Eaux de Guinée (SEG) s’explique par la vétusté des équipements, le déficit d’énergie électrique, l’envahissement des sites de production et la limitation des capacités techniques».

À date, le taux d’accès des populations urbaines a l’eau potable, à travers les réseaux de la SEG, est d’environ 31% avec une desserte par intermittence en deçà de «l’objectif de 75,6% fixé dans le PNDES (2016-2020)»

En fin 2019, l’étude du Schéma Directeur d’Alimentation en Eau Potable du Grand Conakry Vision 2040, réalisée sur financement de la Banque mondiale, estime les besoins de production d’eau potable pour la ville de Conakry à 370 000 m3/jour pour une population de 2,6 millions d’habitants. Alors que la capacité de production existante étant de 150 000 m3/jour, il se dégage un déficit de 220 000 m3/jour (environ 59%).

Pour couvrir ces besoins, il y a lieu de procéder au renforcement des capacités de production, de transport, de traitement, de stockage et de distribution à hauteur de 340 000m3/j dans le cadre du 4ème Projet Eau de Conakry, tenant compte de la capacité de production existante et des productions attendues après l’achèvement des projets en cours (12 forages à Kakoulima et renforcement de la desserte en eau de Conakry sur financement acquis auprès de la BID).

  1. Petite histoire de l’eau en Guinée

Le 1er Projet Eau réalisé entre 1961 et 1964, il a été construit le 1er système d’alimentation en Eau Potable de la ville de Conakry à travers une prise d’eau brute au barrage des grandes chutes et la construction de la première station de traitement d’eau à Yessoulou d’une capacité de 50 000 m3/j y compris la construction des réservoirs de stockage à l’Aviation, Belle-vue et à Almamya. Ce 1er Projet Eau visait l’horizon 1975.

Aussi dans le cadre du second Projet Eau visant l’horizon 2000, réalisé entre 1991 et 1994, il a été exécuté les travaux de doublement partiel de la conduite de transport d’eau brute sur 36 km entre le barrage des Grandes Chutes et Yessoulou en diamètre 1000 mm en Fonte Ductile, la construction de la 2ème station de traitement d’eau à Yessoulou de type filtration directe d’une capacité de 37 000m3/j, le doublement de la conduite de transport d’eau traitée entre Yessoulou et la ville de Conakry sur 23,5 km de diamètre 1100 mm en fonte ductile et la construction des nouveaux réservoirs à Koloma et Simbaya.

Dans le cadre du 3ème Projet Eau, initié en 1995 et qui visait l’horizon 2005, n’a pu être réalisé par manque de financement extérieur qu’entre 2003 et 2009. A travers ce projet, il a été réalisé les travaux de complément de la conduite de transport d’eau brute DN 1000 mm entre grandes Chutes et Yessoulou sur 8 km, la construction de la 3ème station d’eau à Yessoulou d’une capacité de 37 000m3/j et les réservoirs de stockage d’eau au niveau de Sonfonia et de la Cimenterie, ainsi que le Complément de la conduite de transport d’eau traitée DN 1100 mm sur 3,5 km.

En plus de ces actions suscitées, il a été également réalisé des travaux de forages industriels à Kakimbo, au stade du 28 septembre, Terrain rouge de Donka, à Bassia, à Kaporo-Demoudoula et à Kobayah et la construction d’une station de traitement d’eau du lac de Sonfonia ainsi que la réhabilitation partielle des captages de Kakoulima.

C’est l’ensemble de toute ces actions décrites ci-dessus qui fournit la production d’eau traitée actuelle de 164 500m3/j.

  1. Le 4ème Proje Eau t de Conakry

Le 4ème Projet Eau de Conakry une fois réalisé, permettra d’une part de résorber définitivement le déficit d’eau persistant depuis 2001 et d’autre part de garantir la desserte continue en eau potable des populations de Conakry sur une période de 15 ans.

Réalisation d’un système d’adduction d’eau potable d’une capacité de production de 300 000m3/j pour un coût global de 859 000 000 $US et un délai d’exécution de 28 mois à 36 mois.

 Il faut dire aussi dire que pour financer ce 4ème projet eau, l’ancien gouvernement avait obtenu de la banque indienne EXIM BANK INDIA  une ligne de crédit de 170 millions de dollars, suite à la signature, en décembre 2019, d’un accord de prêt avec le gouvernement de la République de Guinée. La ligne de crédit fait partie d’un financement de 210,73 millions de dollars débloqué récemment par Exim Bank of India pour soutenir plusieurs projets de développement en Guinée. C’est une piste à explorer pour le CNRD.

Nous estimons que le coût de ce 4éme projet eau est trop important pour être retenu par les autorités de la transition, cela nous amène à entrevoir un plan d’urgence comme celui mis en œuvre en 2009 par le CNDD pour l’eau et l’électricité pour un montant de 138 millions de dollars . À titre d’exemple c’est ce projet qui a financé la station de Sonfonia lac.

Par Mohamed CAMARA

Associé Gérant Cabinet Conseil MOCAM CONSULTING