ARPT : la mauvaise gestion des anciens dirigeants mise à nu

Emergence – L’Autorité de Régulation des Postes et Télécommunication n’a jamais été bien gérée. C’est  du moins le sentiment mieux partagé dans l’opinion. Ce sentiment est conforté  par le rapport de l’Inspection Générale d’Etat publié la semaine dernière, très accable aussi bien du fonctionnement  que de la gestion des ressources de la structure.

Cave à argent, le soupçonnons tous, a longtemps été, si ça ne l’est pas encore,  une vache laitière  de ses dirigeants et des premiers responsables du pays.  De 2019 à 2022, de Yacouba Cissé à Oumar Barry, le dernier, ses Directeurs Généraux ont fait preuve d’inefficacité  dans la conduite de la boite, selon le rapport. Et cela en toute impunité avec souvent  des complices haut perché.

 

Le rapport de l’IGE révèle que la loi régissant cette entité n’est pas adaptée au cadre juridique des organismes publics autonomes en République de Guinée. Cette loi qui soumet l’ARPT aux obligations fiscales du droit commun  et au code des marchés publics, ne précise pas qu’elle  est un organisme public appartenant à la catégorie des sociétés publiques qui sont gérées en application de la législation de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA).

 

Des  créances non recouvrées, à travers les balances des exercices 2019, 2020, 2021, l’IGE a constaté que le volume de créances douteuses de l’ARPT est important, entrainant des provisions pour dépréciations de créances douteuses, voire des pertes de créances.

 

En moyenne, précise l’IGE,  plus de 35% des créances sont constituées en créances douteuses par l’ARPT. En outre, plus de 99% de ces créances douteuses sont, à leur  tour,  provisionnées, entrainant des charges importantes pour l’ARPT.

 

Par ailleurs, en 2019, renchérit l’IGE,   l’ARPT a consenti des pertes de créances de l’ordre de deux milliards (GNF 2 000 000 000) en faveur de certains de ses clients, notamment certaines radios et télévisions.

 

A cela, s’ajoute, poursuit l’IGE, une autre perte de créances consentie en 2020 en faveur de la SOTELGUI pour un montant de soixante-douze milliards deux cent soixante-douze millions vingt-huit mille trois cent quarante-huit francs guinéens (GNF 72 272 028 348), alors que le patrimoine de la Société des Télécommunications de Guinée (SOTELGUI) a été transféré à la société GUINEE TELECOM S.A. L’IGE regrette de n’avoir  reçu aucune justification valable relative à la constitution de ces créances en créances douteuses qui ont été provisionnées.

 

En outre, l’IGE regrette aussi de n’avoir    aucune preuve matérielle justifiant ces pertes de créances en faveur des clients et fait remarquer que  certaines créances déclarées par l’ARPT sont différentes de celles déclarées par ses débiteurs. Dans le but de s’assurer de l’exactitude des créances de l’ARPT, l’IGE dit  recueillir  des informations auprès de certains débiteurs de l’ARPT.

 

Il ressort, révèle-t-elle ,  que le montant total des créances des clients (EDG, ETI, LAGUIPRES), fournies par l’ARPT, s’élève à douze milliards deux cent cinquante millions trois cent deux mille quatre cent soixante-seize francs guinéens (GNF 12 250 302 476) contre sept milliards trois cent quarante-quatre millions trois cent cinquante-quatre mille quatre cent soixante-seize francs guinéens (GNF 7 344 354 476), déclarées, soit un écart de quatre milliards neuf cent cinq millions neuf cent quarante-huit mille francs guinéens (GNF 4 905 948 000), en faveur de l’ARPT.

 

L’exploitation des licences et autorisations expirées a entrainé des pertes de ressources à l’Etat et à l’ARPT qui  se présentent comme suit :

  • La convention de Orange Guinée S.A avait expiré mais exploitée pendant 25 mois, ce qui entraîne un manque à gagner au détriment des finances de l’Etat de € 4 375 000 ;
  • La convention de MTN Guinée S.A avait expiré mais exploitée pendant 25 mois, ce qui entraîne un manque à gagner au détriment des finances de l’Etat de € 5 288 462 ;
  • La convention de Cellcom Guinée S.A a expiré mais exploitée depuis 32 mois, ce qui entraîne un manque à gagner au détriment des finances de l’Etat de € 6 769 231
  • Le montant total de ces manques à gagner au détriment du Trésor public s’élève à la somme de Seize millions quatre cent-trente-deux mille six cent quatre-vingt-treize Euros (€ 16 432 693).
  • La convention de ETI S.A avait expiré mais exploitée pendant 11 mois, ce qui entraîne un manque à gagner de : GNF 45 833 333.
  • La convention de Skyvision a expiré mais exploitée depuis 41 mois, ce qui entraîne un manque à gagner de GNF 170 833 333 ;
  • La convention de VDC a expiré mais exploitée depuis 49 mois, ce qui entraîne un manque à gagner de GNF 204 166 6667 ;
  • La convention de Mouna Group Technology a expiré mais exploitée depuis 32 mois GNF 133 333 333 ;
  • Afribone Guinée S.A a fonctionné sans convention et ce, depuis 97 mois à compter du 1er janvier 2014 jusqu’à fin janvier 2022. Le manque à gagner y afférent est de GNF 404 166 667. Le montant total de ces manques à gagner au détriment du Trésor public s’élève à la somme de Neuf cent cinquante-huit millions trois cent trente-trois mille trois cent trente-trois francs guinéens (GNF 958 333 333).

En résumé, ces constations faites par l’IGE  qui révèlent  des manques à gagner dus à la mauvaise gestion, méritent incontestablement  l’ouverture  d’une information judiciaire.

Sadikou