TRIBUNE – La célébration du 65ème anniversaire de l’accession de notre pays à la souveraineté et à l’indépendance a été l’occasion pour les autorités de la transition de revisiter les pages glorieuses de l’histoire contemporaine de la Guinée et de raviver la fibre patriotique cultivée par nos illustres devanciers en l’occurrence le camarade président Hamed Sékou Touré et ses compagnons.
Cette initiative heureuse de la semaine de l’indépendance sonne comme un devoir de mémoire, comme la base d’une large concertation citoyenne, et surtout comme un appel à l’unisson autour de l’idéologie des pères fondateurs basée sur l’exigence de la bonne gouvernance, l’engagement patriotique et l’intégrité morale des gouvernants, l’abnégation et le travail de toutes les forces vives, ainsi que le panafricanisme chevillé au corps du Guinéen tout court ; le tout visant à engager durablement la Guinée et l’Afrique sur la voie du progrès et du développement.
C’est l’occasion de complimenter et de féliciter les organisateurs de ladite semaine pour l’esprit de créativité et d’innovation qu’ils ont fait montre pour avoir mis en symbiose le peuple de Guinée, de tout bord, de toutes obédiences, de toutes religions et de toutes régions. Ce mérite, qui est à saluer et à encourager, doit s’inscrire dans un continuum d’éducation civique pour la construction d’un nouveau citoyen guinéen, consciencieux, exemplaire, intègre, honnête et travailleur.
Au-delà du côté festif et cérémonial, le «Sekoutoureisme» ne saura et ne pourra être un instrument de propagande ou d’affichage, ou tout simplement un outil de récupération de la conscience collective. Cette idéologie doit transcender les époques et les générations et pour cela, elle doit être enseignée dans nos écoles et universités et en dehors. C’est pourquoi, j’en appelle à la vigilance du colonel président de la transition afin que cette idéologie qui a fait la fierté, la grandeur et la gloire de notre pays ne soit pas entachée de pédantisme insupportable.
Le slogan « Revisiter le passé historique pour construire l’avenir » ne doit pas être un concept creux, le gouvernement doit rapidement mettre à contribution le génie créateur de toutes les composantes majeures de la nation, les chercheurs, les intellectuels, les communautés savantes, les leaders d’opinion, les leaders communautaires…, pour mener des réflexions et des études sur les problèmes qui gangrènent notre société.
Notre pays regorge d’énormes potentialités, tant au niveau de son sous-sol, de son sol, mais surtout par la qualité des hommes et des femmes qui le peuplent. Dans une solidarité agissante, nous devrons être à même de faire de la Guinée un pays où il fait bon vivre. Le relatif consensus autour des autorités actuelles ne doit pas être compris et pris comme un blanc-seing, mais doit les obliger à donner tout son sens à la devise de notre pays « Travail, Justice et Solidarité ». De ces trois mots de notre devise résident aujourd’hui les maux qui gangrènent notre pays et qui empêchent tout progrès.
Du travail, il en manque terriblement pour notre jeunesse et le taux de chômage atteint des niveaux incroyablement élevés. Poser les jalons pour tendre vers le plein emploi doit être la priorité absolue des autorités de la transition, car une jeunesse déboussolée et désemparée est une bombe à retardement.
De la Justice, il nous en faut pour engager durablement le pays vers la voie de la gouvernance vertueuse. Au-delà, les autorités doivent travailler d’arrache-pied à la promotion et à la mise en place de la justice sociale et surtout d’en être le garant.
De la solidarité, il nous en faut pour assoir et conduire les meilleures politiques de redistribution des ressources et de répartition des richesses. Aucun Guinéen ne doit rester sur le banc de la désolation et de la pauvreté.
Pour des nostalgiques de ce passé glorieux, je me dois de souligner et de reconnaitre le mérite du CNRD et de son Président dans les efforts de valorisation des acquis historiques à travers la résurgence du « Sekoutoureisme ». Mais, je préviens que je serai parmi les sentinelles de la révolution, car se prévaloir de cette idéologie, c’est cultiver le respect vis-à-vis du denier et du bien public, c’est encourager le leadership de compétence, et c’est enfin servir son peuple et non se servir des acquis du peuple.
Enfin, je sollicite et encourage les autorités de la transition à continuer de s’inspirer du «Sekoutoureisme» pour bâtir et entretenir des relations de militants avec le peuple de Guinée et non pas des rapports essentiellement mercantiles ; des relations basées sur la volonté conjointe de conduire le pays vers le progrès social tant souhaité et enfin des relations qui s’inspirent du passé glorieux et qui mobilisent nos cultures et nos traditions pour construire des identités propres à nos valeurs et exemptes de tout mimétisme.
Seregbe Keita
Analyste en sciences sociales et politique
& Doctorante en politiques publiques